Spencer Lewis a
plusieurs fois signalé l’existence d’une femme qui est la déléguée de l'Ordre
rosicrucien en Inde, son portrait apparaît dans l'ouvrage intitulé Manuel Rosicrucien, et au bas de cette
image il y a une note qui dit :
« Mme May Banks-Stacey Co-fondatrice et
première grande matre américaine (voir référence historique page 153). »
Dans cette
référence est écrit :
« Elle fut membre de la branche
anglaise qui a parrainé le premier mouvement en Amérique, Mme May Bank-Stacey
est descendante d'Oliver Cromwell et de la famille D'Arcy de France ; elle
a mis ces papiers entre les mains de Lewis, tout comme ils lui avaient été officiellement
transmis par le dernier des premiers rosicruciens américains, avec le joyau et
la clé d'autorité qu'elle avait reçus du Grand Maître de l'Ordre de l'Inde,
lorsqu'elle était officier de l'Ordre dans ce pays. »
(p.153)
Et là, nous nous
faisons plusieurs questions :
Un membre de l'Ordre Rosicrucien de l'Inde ? Où
était cet Ordre en Inde ? Pourquoi il n'y a aucune référence historique
sauf dans les écrits de Lewis ?
Papiers reçus du Grand Maître de l'Ordre en Inde ?
Qui était ce Grand Maître ?
Tous les étudiants
sérieux de l'ésotérisme et de l’histoire du Rosicrucianisme aimeraient
connaître ces données, et bien sûr, qu'elles puissent être vérifiées.
Le fils de Spencer
Lewis, Ralph Lewis, dans son ouvrage Mission
Cosmique Accomplie, parle également de Mme Bank-Stacey lorsqu'il évoque la
déception que son père a eue après qu’aucune personne n'ait signé les documents
pour la première fois où il a proposé la fondation d’AMORC, et il dit que dans
la nuit du 25 novembre 1914 (anniversaire de Lewis) la déléguée de l'Inde lui a
donné, avec une rose, les papiers et les bijoux d'autorité pour fonder AMORC.
Dans un autre
écrit de Lewis intitulé La Lumière de
l'Égypte, il est dit :
« Elle fut une grande initiée de la
plus ancienne organisation rosicrucienne à Londres et à Paris, descendante des
D'Arcy de France. C'était une femme qui avait beaucoup voyagé et possédait de
nombreuses affiliations et qui s’est présenté comme la Déléguée spéciale de
l'Ordre en Inde. Elle a montré au Dr. Lewis et au comité fondateur les
documents de préparations finales pour le grand travail, ainsi que le joyau de
l'autorité, un emblème officiel rare, et des trésors inestimables des archives
du Centre de l’Est. »
(p.14)
Et encore une
fois nous devons nous demander :
Où sont ces papiers que personne n'a vus ?
Et où est ce bijou ? Où se trouvent ces
trésors ?
Le 1er avril
1915 à 20:30 heures en présence d'une vingtaine de personnes une déclaration
est signée qu’à continuation nous montrons le fac-similé qui figure dans le livre
d'AMORC Les Documents Rosicruciens
(SGL d'AMORC Inc, Ed 1975, p.6).
Ce document dit
ceci :
Lors de cette
réunion dûment constituée, nous, soussignés, Mesdames et Messieurs de la ville
de New York, devenons officiellement membres du Conseil suprême de l'Ordre
antique et mystique de la Rose-Croix [AMORC] conformément aux rites et
cérémonies antiques, sous la direction et l'approbation du Très Grand et
Puissant Grand Maître Général d'Amérique [Spencer Lewis].
En conséquence,
la proclamation et l'établissement de « l'Ordre Rosicrucien en Amérique » ont
porté à la connaissance de tous et nous reconnaissons les Officiers de la
Grande Loge, dont les noms figurent ici comme dûment élus conformément au
Premier Manifeste Américain.
Signé le 1er.
Jour d'avril 1915.
H. Spencer
Lewis
Grand Maître général
……………….
Matre générale
(c'est-à-dire Mme Stacey mais sa signature n'apparaît pas)
Nicolas tempête
Adjoint au
Grand Maître général
Thor Kiimalehto
Secrétaire
général
Que la lumière soit - Fiat Lux
Et plus en bas
se trouvent les signatures des autres participants.
_ _ _
Face à cela, et
puisque nous sommes intéressés à connaître la vérité, posons-nous quelques
questions :
Étant donné que
Mme Stacey était si importante car elle était la déléguée de l'Inde, membre de
nombreuses associations, co-fondatrice d'AMORC, première Grande Matre d'AMORC,
et qui a donné des documents et des bijoux à Spencer Lewis, alors :
Pourquoi on ne sait rien d’elle en dehors des écrits de
Spencer Lewis ?
Pourquoi n'y a-t-il aucune référence à la participation
de Mme Stacey à la réunion du 1er avril 1915 ?
Pourquoi la signature de Mme Stacey n'apparaît-elle pas
dans ce document comme on peut le voir sur l'image ?
Est-ce vraiment Mme Stacey qui apparaît sur la
photographie du livre d'AMORC ?
RÉVÉLATION DE QUI EST VÉRITABLEMENT
CETTE FEMME
J'ai récemment
reçu un document intéressant envoyé par l’historien, M. Marcel Roggemans, que
je reproduis en partie ci-dessous et qui correspond à un article qui a été publié
en 1996 par David T. Rocks (voir lien).
C’est un
document très complet incluant même les adresses des domiciles successifs de
Mme Stacey depuis le moment où elle a commencé à percevoir une pension de veuve
jusqu'à sa mort à Evanston, Illinois, États-Unis.
Dans ce
document on découvre qu’en réalité elle s’appelait Mary Henrietta Banks, née à
Hollidaysbourg, Pennsylvanie, en 1846, et mariée au capitaine (pas colonel) May
Humpfreys Stacey en 1866, avec qui elle a eu 3 enfants (une fille et deux
garçons).
Le capitaine
Stacey est décédé à Fort Ontario en 1886, victime d'une paralysie causée par
ses blessures reçues pendant la guerre de Sécession, laissant sa femme May
Stacey veuve et mère de trois enfants :
-
Délia, 15 ans
-
Aubrey, 12 ans et
-
Edward Cecil Cronwell, 10 ans
Selon le
dossier du secrétaire à la guerre des États-Unis, elle a reçu une pension de
veuve de 20 dollars par mois, puis augmenté à 30 dollars, et un plus de 2
dollars par mois pour chaque enfant jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 16
ans.
On sait que Mme
Stacey a vécu en 1889 à New York de 1898 à 1899 dans une pension située au 101
West 40th Street, New York City, et que son propriétaire, M. Fred Stanley
Betts, a déposé une réclamation devant les autorités parce que Mme Stacey lui devait
un loyer accumulé de 450 dollars.
Mme Mary
Henrietta Banks, dont le nom d'épouse était Mary Stacey (et non pas Mme May
Banks-Stacey) est décédée à Evanston, dans l'Illinois, le 21 janvier 1918.
Le testament
holographique de Mme Stacey a été déposé dans les archives générales et les
dossiers du comté de Cook, Illinois, en mars 1918, par sa fille, et tous ses
biens s'élevaient à une valeur estimée à environ
100 dollars, une quantité vraiment très maigre.
De toute cette
histoire largement documentée comme on peut le voir dans l’article originel, il
ressort que :
1.- Mme Mary
Stacey est une personne réelle mais qui n'a que peu ou rien à voir avec May Bank Stacey, qui selon toutes les
preuves est un personnage inventé par Lewis.
2.- Mme Stacey
était une veuve pauvre, mère de 3 enfants, avec une petite pension totalement
insuffisante pour une vie normale et digne.
3.- Par
exemple, on sait que Mme Stacey devait au moins 450 dollars a son locataire ce
qui indique la pauvreté de la veuve Stacey.
4.- Compte tenu
de sa pauvreté et des dettes qu'elle a accumulées, ainsi que du fait qu'elle
est restée veuve avec trois enfants dont elle s'est occupée et qu’elle n'a pas
abandonné, comment est-il possible que cette dame ait voyagé à Angleterre,
Paris, Égypte et l'Inde, selon Lewis ? Comment est-il possible qu'elle ait
été un Officier de l'Ordre Rosicrucien dans ces pays, ce qui suppose un séjour
prolongé dans l’étranger, et de grands coûts par ces très longs voyages, et
qu'elle se soit vu confier une mission comme celle que dit Lewis ?
5.- En tenant
compte, uniquement de ces données, et sans entrer dans d'autres profondeurs,
telles que celle de sa correspondance avec le Département du Secrétaire à la
Guerre concernant les promotions dans l'armée de ses fils ; sa supposée
descendance des Cronwell d'Angleterre et les D'Arci de France, fait qui
n'apparaît pas dans sa généalogie ; que Lewis l'appelle d'un curieux nom : le prénom de son mari, May, son nom de jeune fille Banks, puis le nom de famille de son
mari Stacey, formant ainsi May Banks Stacey ; le fait que Lewis
lui donne un lieu de naissance différent de celui qui apparaît dans son acte de
naissance ; et que Lewis n'ait jamais indiqué sa date de naissance,
probablement parce qu'il ne la connaissait pas, etc., etc., etc.
6.- Si en plus on
considère que Mme Stacey n'a jamais participé aux réunions du groupe de Lewis,
et qu’elle n'a pas signé la charte de la fondation d'AMORC, où la signature de
"Matre General" est manquante, il n'y a pas d'autre possibilité que conclure
que Lewis connaissait très peu ou presque rien de Mme Stacey.
7.- Sans aller
jusqu'à affirmer, comme l’a fait Clymer, bien qu'il soit très possible que ce
soit le cas, que Mme Stacey était une personne qui s'est laissé photographier
en échange d'argent, sans aucune autre relation avec Lewis, il est fort
probable que Lewis ait rencontré à Mme Stacey occasionnellement et n'ait eu
aucune amitié avec elle, utilisant sa photographie et une histoire fictive pour
justifier la fondation d'AMORC et essayer de donner crédibilité à ses mensonges.
Du point de vue
de l'historie, cette affaire est un ensemble de falsifications et d'utilisation
abusive et frauduleuse de la personnalité d'un individu, sûrement ignorant
comment son image et son nom ont été utilisés.
Et du point de
vue humain, il est honteux que Lewis ait utilisé à cette pauvre femme, une
veuve et avec de graves problèmes financiers, pour manipuler aux membres d’AMORC.
~ * ~
Et ceci est encore un exemple de plus de l'énorme
charlatanisme et manque d'éthique de Spencer Lewis.
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